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 Un gala peu charitable - PV Maxime

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Eulalie Vernier
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Un opéra : histoire où un baryton fait tout pour empêcher un ténor de coucher avec la soprano.
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MessageSujet: Un gala peu charitable - PV Maxime   Un gala peu charitable - PV Maxime Icon_minitime1Sam 1 Avr - 10:53

Eulalie avait quitté sa demeure en tout début d'après midi, après avoir révisé sa mise plusieurs fois. Ce soir, une riche famille Parisienne donnait un gala de charité, sans doute pour des orphelins ou des blessés de guerre, elle ne se rappelait plus. La seule chose tangible qu'elle avait entre les mains, c'était l'adresse à laquelle elle devait se rendre ainsi que le cachet plutôt généreux dont elle avait bénéficié pour l'occasion.
La chanteuse connaissait bien ce genre de personnes. Attachées aux anciennes valeurs, toutes prêtes à se montrer impliquées dans des causes humanitaires, mais peu disposées à sympathiser avec des gens du peuple. Quelques années auparavant, elle avait accepté une performance du même genre et s'était retrouvée cloîtrée dans une petite chambre, coupée du reste de l'assemblée, jusqu'à-ce que vienne l'heure pour elle de se produire.

Les Andrieu seraient-ils différents ? Elle demandait à voir.

Elle avait sorti ses deux plus belles robes pour se rendre à cette occasion. C'était un jeune homme, Alain de Boissieu, qui les lui avait offertes. Ils s'étaient rencontré au cours d'un énième bal à l'opéra et la jeune femme avait séduit ce jeune cavalier de Saint Cyr, sans l'avoir vraiment cherché. Bien qu'elle ne lui ait jamais donné le change, cela n'avait pas empêché le jeune noble de lui faire deux somptueux cadeaux en 1939, quelques mois seulement avant l'invasion allemande. Ainsi, elle avait hérité d'une robe de jour et d'une robe de soirée griffées respectivement par Elsa Schiaparelli et Madeleine Vionnet. De quoi lui permettre de paraître à la hauteur des attentes de la caste dirigeante lors de ses apparitions privées.
La cantatrice avait placé la robe du soir dans une housse protectrice, en prévision de ce soir, et avait passé la robe de jour. Elle était taillée dans un tissus de coton d'excellente qualité, de couleur bleu marine et parsemé d'une trame de points blancs. Le col était prude, les manches avaient juste ce qu'il fallait d'originalité. Eulalie coiffa ses cheveux en rouleaux, selon la mode, et passa des gants de résille ainsi que son manteau d'été pour parfaire sa mise.

En se regardant dans le miroir, elle repensa à son ami Alain. Depuis la guerre, ils ne s'étaient pas revus. Aux dernières nouvelles, il avait rejoint la France Libre pour se battre en suivant les ordres du Général de Gaulle. Pourvu qu'il s'en sorte...

Eulalie fut tirée de ses pensées par la concierge qui frappait à sa porte pour la prévenir de l'arrivée du chauffeur de taxi. Précipitamment, la jeune femme saisit son sac à main, sa mallette et sa housse avant de quitter son appartement. A l'abri derrière les vitres du véhicule rutilant, elle regarda filer les grands immeubles parisiens. Elle avait l'impression que depuis quelques semaines, la ville était agitée. Des bruits de couloirs commençaient à courir, sous entendant que l'Empire Allemand ne serait pas en aussi bonne posture que ce qu'il laissait croire. Peut-être était-ce la raison pour laquelle le gouvernement faisait preuve d'autant d'opulence en matière d'événements et que des familles collaboratrices comme les Andrieu semblaient de toutes les fêtes.
Et si l’Allemagne perdait, que se passerait-il ? Serait-elle punie pour avoir continué à chanter sous le régime, pour avoir discuté avec des allemands ? Qu’adviendrait-il de son oncle, du Hauptmann Landgraf ? La jeune femme frémit en y songeant. Elle ne devait pas accorder autant d’importance à cet allemand… Elle ne pouvait pas se le permettre. En public, elle avait un rôle à tenir, mais elle ne pouvait pas laisser sa vie privée se laisser corrompre par l’Allemagne, quand bien même son cœur lui criait le contraire.

Enfin, le taxi stoppa, devant un imposant immeuble à la façade ouvragée. D’un air timide, elle descendit alors qu’une femme de chambre déboulait de l’escalier pour prendre ses valises. Elle replaça discrètement une épingle de son chignon, épousseta sa robe et entra. Le hall était immense, d’un blanc aveuglant. Tout était si rutilant qu’elle se serait crue dans un hôtel étoilé à l’autre bout du monde. Elle emprunta le grand escalier et essaya de ne pas avoir l’air de trop admirer la largeur des marches ou l’impeccable entretien du tapis rouge. Arriver au bon étage ne fut pas long. Elle savait que les grandes familles logeaient souvent au premier ou au deuxième étage des grands immeubles. La domestique la fit entrer et l’annonça avant de s’éclipser pour déposer ses affaires dans une petite chambre annexe. La cantatrice arbora son plus grand sourire et salua la femme qui venait dans sa direction avec déférence.

- Madame Andrieu, c’est un plaisir pour moi de venir me produire chez vous ce soir.

Eulalie essayait de paraître agréable et d’oublier qu’elle se trouvait face à des collaborateurs antisémites notoires. Elle aurait volontiers manifesté sa révolte mais cela n’aurait abouti à rien d’autre qu’une série d’ennui pour elle et sa famille. Elle se savait jeune et foncièrement adorable. Si elle se montrait courtoise, au moins ne lui serait-on pas désagréable. Elle appris alors que le fils de la famille l’accompagnerait au piano, ce qui impliquait une répétition quelques heures avant. Lalie décida alors de s’enquérir du répertoire que la famille avait choisi. La jeune femme était très cultivée et s’adaptait facilement, elle n’avait aucun doute sur ses capacités à interpréter un morceau à la dernière minute.

- Avez-vous décidé de ce que vous aimeriez voir jouer ? J’ai apporté, dans le doute, quelques partitions en pensant que vous voudriez peut-être les consulter.

Elle avait l’impression de marcher sur des œufs. Elle n’était jamais à l’aise face à ce genre de personnes, qui se permettaient de jauger une personne en fonction de sa naissance ou de sa religion. Elle ne savait pas dans quelle mesure se montrer réservée ou sympathique. Dieu qu’elle aurait préféré rester chez elle…
En parlant de Dieu, elle nota d’ailleurs une croix, accrochée à un mur. Ce devait être une famille catholique et pratiquante... Elle espéra que personne ici n’était au courant de son appartenance au protestantisme. Elle était ici pour chanter, pas pour revivre une Saint-Barthélémy.

On l’introduisit dans le grand salon qui était en pleine préparation pour la réception. Elle vit la petite scène qui avait été aménagée, le piano et le jeune homme qui se tenait tout près. Il n’avait pas l’air foncièrement désagréable mais la jeune femme ne voulait pas prononcer le moindre jugement de valeur avant d’avoir eu affaire à lui directement. On le lui présenta comme Maxime Andrieu, celui qui l’accompagnerait au piano. Elle se fendit d’un charmant sourire et inclina humblement la tête.

- Je suis ravie de faire votre connaissance Monsieur Andrieu.

Elle aurait préféré commencer à chanter, elle n’était pas à l’aise avec les mondanités, mais comment prendre les commandes alors que cette maison n’était pas la sienne et qu’elle était entourée de gens aux opinions qui semblaient de loin opposées aux siennes ?
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Maxime Andrieu
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MessageSujet: Re: Un gala peu charitable - PV Maxime   Un gala peu charitable - PV Maxime Icon_minitime1Dim 16 Juil - 16:54

Maxime referma la porte de l’appartement familial derrière lui en veillant à ne pas la claquer de manière trop sonore. Un coup d’œil jeté à l’horloge lui confirma ce qu’il savait déjà : il était en retard, et s’il savait pertinemment qu’il ne lui échapperait pas bien longtemps, il préférait éviter de donner une raison immédiate à sa chère mère de lui tomber dessus. On ne pouvait hélas en espérer autant des quatre bichons de ladite mère, dont l’un – le plus abruti, pour autant qu’on puisse les départager dans ce domaine – se précipita vers lui en jappant pathétiquement. Maxime soupira en entendant la voix de sa mère qui résonnait dans le salon s’interrompre un instant. Deux secondes plus tard, Jeanne Andrieu passait la tête par la porte et il n’y avait plus aucun moyen d’échapper à quoi que ce soit. Même dans une position un peu tordue, parce qu’elle devait continuer à maintenir le combiné du téléphone contre son oreille, Jeanne conservait cette attitude impérieuse et hautaine qui soufflait aussitôt toute velléité de désobéissance. Elle lui fit signe d’approcher et Maxime ne put guère que dégager d’un coup de pied le bichon de son passage pour toute vengeance, ignorant le glapissement de la créature. Dans le grand salon de l’appartement, une poignée de domestiques recrutés pour l’occasion s’agitait en suivant les gestes silencieux de la maîtresse des lieux. Cette dernière, toute à sa conversation, n’en avait pas moins un œil sur tout, ce qui était en soi relativement impressionnant.
- … et juste avant de partir, je lui ai dit « ça tombe bien, ma chère, j’organise une magnifique réception, et vous n’êtes pas invitée ! », racontait Jeanne Andrieu dans le combiné. Quel effet ça a eu… ! Vous pensez bien, il y a longtemps qu’elle n’est plus conviée nulle part, elle devait s’imaginer que je lui ferai cette politesse. Une Israélite ! … Oui quelle idée n’est-ce pas ? Et dire que nous continuons à couvrir et protéger certains d’entre eux…
Maxime s’affala dans un fauteuil en prêtant une oreille distraite aux bavardages de sa mère, de plus en plus acides sur le sujet des grandes familles juives que Vichy et les Allemands n’avaient pas encore fait disparaître. Il était à peu près certain que le nom des Lévi avait traversé l’esprit de Jeanne Andrieu, et de son côté, il songea à Rachel. Il l’avait croisée – ou plutôt suivie – à la bibliothèque de la Sorbonne, où travailler ne l’avait pas empêché de continuer à tenter d’en savoir plus sur sa camarade vouée à subir le sort que sa mère souhaitait probablement aux familles comme la sienne, si Maxime parvenait à ses fins. Mais s’il commençait à en savoir beaucoup sur Rachel, de ses activités, elle n’avait toujours rien trahi. Heureusement, il en fallait toujours plus pour le décourager. Et cette petite croisade personnelle valait bien d’arriver en retard pour la préparation de la réception de sa chère mère.

La mère en question finit par raccrocher. Elle ne s’embarrassa pas d’autre chose que d’un regard réprobateur pour reprocher à son fils ledit retard, et enchaîna avec les consignes qu’elle avait à lui donner. Maxime contint un soupir : il savait très bien ce que sa mère voulait de lui. A chaque fois qu’elle organisait une soirée comme celle-ci, elle le voulait vissé au siège du piano pour impressionner ses hôtes toujours plus nombreux, toujours plus allemands ou radicaux de la collaboration. Le couple Andrieu, après des années de scepticisme rancunier, avait fini par choisir son camp : celui de Laval, ou en tout cas ce qui s’en approchait le plus dans la capitale. Un choix remarquablement judicieux – pour leur position en tout cas – car l’appartement était de nouveau toujours plus plein, comme aux grandes heures de feue la IIIè République. Ce soir, c’était pour lever des fonds pour le Secours National que l’on allait festoyer et Maxime, quant à lui, ne serait pas seul derrière son piano. Une chanteuse allait l’accompagner.
- Mademoiselle Vernier, une jeune prodige de Garnier à ce qu’on m’a dit. Elle sera bientôt là, vous avez une deux heures pour répéter et vous préparer.
Là-dessus, Jeanne Andrieu quitta les lieux et laissa son fils cadet à sa mauvaise humeur. Il ne détestait rien plus que la manie de sa mère de l’exhiber à la première occasion – et ce depuis des années. Mais il savait aussi qu’il n’était pas question de lui opposer le moindre refus, aussi finit-il par se lever pour aller se préparer. Lorsqu’il revint dans le salon, nulle trace de sa mère ou de la soi-disant prodige de l’Opéra, mais en revanche son frère, Nicolas, feuilletait le journal (quand il ne l’utilisait pas pour chasser le bichon qui revenait obstinément s’asseoir en face de lui et le fixer stupidement). Lui aussi devait rester et aurait probablement préféré être ailleurs, seulement au moins, il n’avait jamais réussi à sortir plus de deux notes justes du moindre instrument. Une sardine avait plus d’oreille que lui.

- J’ai trouvé ta lecture préférée dans le courrier, ironisa Nicolas en désigna des feuillets posés sur le piano. Tu te débrouilleras pour que ça disparaisse avant que quelqu’un tombe dessus.
Maxime esquissa un sourire narquois en voyant se détacher sur le vieux papier le titre du Réveil.
- Toi et tes pudeurs de gazelle… Qui te dit que ça ne ferait pas rire les invités ? lança-t-il en ouvrant le journal clandestin à la recherche de la dernière nouvelle de Perceval – Rachel Lévi, donc.
- Hum, pas père en tout cas, marmonna Nicolas.
- … Ouais, t'as raison.
En effet, Maxime venait de tomber sur la rubrique mondaine, dont la cible n’était autre que Camille Andrieu cette fois-ci. En revanche, rien de la part de Perceval, ce qui était toujours décevant, il aimait faire savoir à sa camarade qu’il savait reconnaître son style et qu’elle finirait bien par devoir avouer que c’était elle. Des bruits de voix lui firent lever la tête et ce qui devait être le prodige de la soirée fit son entrée dans le salon, escortée par la jeune domestique que Jeanne Andrieu avait embauchée quelques semaines plus tôt pour aider la vieille gouvernante.
- Je suis ravie de faire votre connaissance Monsieur Andrieu.
Maxime détailla la jeune femme de haut en bas sans vraiment se gêner. Coiffée de rouleaux à la mode, cintrée dans une robe tout à fait décente, elle était plutôt jolie, mais surtout très mal à l’aise. Elle avait beau essayer de s’en cacher, hélas pour elle, le cadet Andrieu avait le nez pour ça. Amusé, il esquissa un peu carnassier et se décolla du piano sur lequel il était appuyé.
- Enchanté mademoiselle… Vernier c’est ça ? lança-t-il en la dévisageant de manière appuyée. Et voilà mon frère, Nicolas… ajouta-t-il en se tournant vers l’intéressée qui jugeait également la nouvelle venue. Essaie d’avoir l’air poli pour une fois, on se lève pour les dames.

Nicolas haussa un sourcil, salua vaguement Eulalie, et replongea dans son journal sans rien ajouter, ni bouger. Maxime revint à la jeune femme. Il allait faire un commentaire sur l’impolitesse des futurs avocats mais mademoiselle Vernier semblait fixer quelque chose et il réalisa qu’il avait toujours l’exemplaire du Réveil en main.
- Vous tombez à pic, mademoiselle, nous étions justement en pleine lecture. Monsieur là-bas préfère les canaux officiels, même s’ils sont profondément ennuyeux, moi je trouve plus intéressant d’aller voir ailleurs ce qu’on nous raconte. Qu'est-ce que vous en pensez ?
Il brandit le journal clandestin comme s’il était tout à fait normal d’évoquer le sujet, ignorant l’œillade perplexe de son frère aîné. Il fit mine de regarder rapidement les pages, un large sourire aux lèvres.
- Entre nous, un peu de révolte de temps en temps, ça ne fait de mal à personne ? Le fond n’est pas mauvais…
Il leva la tête et fixa à nouveau Eulalie… dont l’expression le satisfit pleinement. Il laissa un peu durer le silence qui s’était installé, avant de refermer vivement la feuille de chou.
- Je plaisante, ne faites pas ces tête-là ! lança-t-il soudain en riant. Ceux-là ont peut-être trouvé Excalibur et la table ronde, mais ils ne sont pas prêts de pondre la moindre révolution.
Il froissa les feuillets et les lança sur Nicolas qui protesta vaguement (mais riait sous cape), satisfait de son effet. La plaisanterie n’était pas forcément de très bon goût, un peu cruelle même, mais tout observateur qu’il fut, Maxime ne pouvait pas deviner qu’Eulalie était plutôt de ceux qui lisaient vraiment le Réveil pour ce qu’il disait et non pour y trouver des preuves contre ses camarades. La jeune chanteuse ne faisait que les frais de l’absence totale d’envie du fils Andrieu de se trouver là et de jouer le chien savant pour les beaux yeux du gratin parisien. Elle n’y était pour rien, mais tant pis pour elle, elle l’agaçait avec sa robe prude et ses airs de ne pas savoir où se mettre. Brusquement, il lui tourna le dos, alla s’installer sur son tabouret et ouvrit le piano.
- Bon, j’espère que vous savez chanter en allemand. Qu’est-ce que vous connaissez ?
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Eulalie Vernier
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MessageSujet: Re: Un gala peu charitable - PV Maxime   Un gala peu charitable - PV Maxime Icon_minitime1Dim 6 Aoû - 22:07

Le fils Andrieu n’inspirait vraiment pas confiance à la jeune cantatrice. Elle perçut tout de suite sa façon de la juger, elle ressentit le côté carnassier de son sourire. C’était un enfant pourri gâté, qui n’avait connu que le confort et le succès. Un collaborateur, un ennemi de tout ce qu’elle chérissait. Cependant, elle se devait de faire bonne figure. C’était ses idéaux contre sa carrière, et vu les moyens que ses parents avaient investi dans son éducation, elle n’avait pas l’intention de gâcher ses opportunités en cédant bêtement à ses impulsions, contrairement à son cousin. Lâche ? Sans doute. Mais pour sa conscience, elle préférait se croire raisonnable et mesurée.

Elle se tourna vers le dénommé Nicolas, qui ne s’était pas donné la peine de se lever à son entrée. Eulalie accueillit son semblant de salut d’un aimable signe de tête en triturant imperceptiblement la hanse de son sac à main. Elle aperçut soudainement la main du jeune homme et reconnut presque instantanément le titre de ce qu’il lisait. Le Réveil. Se pouvait-il que la famille, derrière sa façade collaboratrice, soit résistante ? Non… C’était impossible !
Ne sachant plus vraiment comment agir, elle laissa le jeune homme parler et exposer devant tout le monde sa lecture. C’était trop certain, trop narquois pour être sérieux… Elle ne devait surtout pas laisser paraître qu’elle était touchée par ce qu’il semblait vouloir sous entendre à propos de la résistance.
Totalement circonspecte, elle ne réagit pas immédiatement lorsqu’il lui demanda son avis, se contentant d’ouvrir la bouche dans le vide pour la refermer presque aussitôt.

- Je pense que la lecture des journaux empiète beaucoup trop de temps sur ma lecture de mes partition, à vrai dire…

Une esquive réthorique de la jeune Vernier qui resterait probablement dans les annales.

Elle se retint de tiquer à nouveau. Un peu de révolte… Sous estimait-il à ce point la force sourde qui grognait dans Paris et en France ? Le refus de baisser la tête face à l’envahisseur ennemi… Pour lui ce n’était rien de plus qu’une révolte ? Eulalie n’était pas résistante elle-même. Elle ne s’en sentait pas la force. Mais elle soupçonnait des gens dans son entourage, en particulier le fils de la meilleure amie de sa tante, qui était un peu devenu comme un grand cousin. Elle avait pu ressentir la force de ses convictions. Ce n’était pas la révolte, c’était l’indignation profonde, la résistance, la révolution. Ces bourgeois, bien engoncés dans leurs appartements, finiraient par tomber de haut le jour où la révolte finirait par éclater pour de bon.

Lorsqu’enfin, le jeune homme laissa paraître qu’il plaisantait, elle ne put lui offrir rien d’autre qu’un sourire crispé. Heureusement pour elle, il se tourna et ouvrit le piano en s’enquérant de ses connaissances en allemand. Avec un léger sourire aimable, elle ouvrit son sac pour en sortir plusieurs partitions.

- L’allemand n’est pas un problème pour moi, je connais la plupart du répertoire romantique… J’ai ici quelques ouvrages des Lieders des époux Mahler. J’ai également Schumann, Beethoven, Schubert ou Wolf.

Elle les déposa avec délicatesse sur le coin du piano et sortit une dernière pochette en cuir.

- Je me suis permis de sélectionner les chants que je trouvais les plus appropriés pour une soirée mondaine, si vous souhaitez y jeter un œil…

Heureusement pour Eulalie, l’éducation mondaine minimale qu’elle avait reçue lui avait permis de ne pas faire de faux pas dans sa sélection. Ils avaient peu de temps devant eux, elle venait de leur faire gagner un temps précieux. Une fois mis d’accord sur le morceau de départ, la jeune femme enleva ses gants, déposa son sac et se prépara pour chanter.

Aussitôt, la jeune femme intimidée laissa la place à la chanteuse d’opéra. Le petit coin aménagé devenait sa scène. Elle maîtrisait sa voix pour pouvoir ravir l’assemblée, sans pour autant captiver le monopole de l’attention. Elle devait penser aux petits indiscrets qui voudraient discuter ou manger pendant qu’elle chanterait. Elle était moins une vedette qu’un gramophone ce soir mais ça lui allait. La cantatrice avait été rémunérée largement, on ne lui adresserait sans doute pas la parole. Elle pouvait chanter, se faire plaisir, vivre la musique.
Elle se rendit compte que le jeune fils Andrieu se débrouillait merveilleusement bien au piano. Elle avait pensé que sa mère avait exagéré ses capacités, comme toute maman un peu trop fière de sa progéniture, mais il semblait avoir de l’or sous les doigts. Le rythme était assuré, la nuance maîtrisée toute en finesse. Si ce jeune homme n’avait pas été un idiot fini, elle aurait sans doute apprécié faire plus souvent de la musique en sa compagnie…

Le premier morceau fut vite terminé. Déjà elle se préparait au suivant. Heureusement qu’elle s’était échauffée la voix avant d’arriver ! Démarrer ainsi sur les chapeaux de roue, c’était rarement bon pour les cordes vocales. Un bref regard dans la direction du fils Andrieu la fit légèrement tiquer. Il avait l’air agacé… Ou peut-être était-ce son faciès naturel ? Comment savoir ? Étrangement, elle avait l’impression que le morceau qu’elle avait entonné allait un peu plus vite qu’à l’accoutumée. L’air de rien, elle rattrapa le tempo sans accroc mais un éclair dans son regard avait trahi son incrédulité.

Que faisait donc Maxime Andrieu ?
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