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 De l'association de deux nuisibles [rp unique]

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Alexandre Reigner
Alexandre Reigner
◆ Tireur d'élite ◆



Masculin

■ topics : OUVERTS
■ mes posts : 455
■ avatar : James Purefoy
■ profession : Avocat et ancien député

PAPIERS !
■ religion: Athée, profondément anticlérical.
■ situation amoureuse: Marié à Louise Carron.
■ avis à la population:

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MessageSujet: De l'association de deux nuisibles [rp unique]   De l'association de deux nuisibles [rp unique] Icon_minitime1Ven 15 Mar - 16:23

Alexandre n’entendit soudain plus rien au bout du fil, sinon une sonnerie stridente. À son tour il raccrocha, et jeta au combiné un regard profondément perplexe. Pierre Carron, ne lui avait pas demandé de passer le voir au bureau qu’il occupait lorsqu’il se trouvait à Paris - ça aurait été faire preuve sinon d’amabilité, du moins d’un minimum de respect, et c’était bien trop lui en demander. Non, son bien-aimé beau-père venait purement et simplement de le convoquer, par secrétaire interposée, et ce « dans les plus brefs délais, tout de suite dans l’idéal » selon les dires de l'acariâtre jeune femme qui faisait une paire parfaitement imbuvable avec son patron (et qui avait sans doute été recrutée pour cela plus que pour ses compétences). Alexandre poussa un profond soupir, et un second, puisque c’était la seule chose qu’il pouvait faire. Cet homme le menait par le bout du nez, ce qui déplaisait beaucoup à l’égo, on le sait, plutôt développé de l’avocat. Mais à chaque fois qu’il songeait à l’envoyer paître, il se rappelait que Carron était son seul lien avec Louise et les enfants, puis accessoirement, que son poste auprès du ministre de la Justice en faisait techniquement son supérieur. Il avait osé prétendre qu’avoir comme gendre un avocat dont la réputation n’était plus à faire mettait à sa disposition un large réseau, avantage non-négligeable en plus de ses propres compétences d’ancien juriste. Et évidemment, personne n’avait eu la brillante idée de refuser la fonction de secrétaire d’Etat à cet homme plein de ressources et publiquement acquis à la cause de la révolution nationale. Vichy recrutait décidément parmi les pires, et Alexandre, une fois encore, ne put rien faire de ce constat sinon pousser un troisième long soupir. Carron avait tout à fait les moyens de se montrer imbuvable et autoritaire : il le tenait. Et encore, si l’avocat se méfiait d’instinct du pourquoi de cette convocation, il ne soupçonnait pas à quel point la situation pouvait, et allait empirer.

Agacé d’avance, il repoussa loin sur son bureau le dossier qu’il avait ouvert une heure plus tôt sans parvenir à s’y plonger. Une affaire de marché noir - encore une. Plus les parisiens manquaient de vivres et se désespéraient de trouver quelque chose de décent à manger, plus les réseaux parallèles prenaient de l’importance, et plus ils s’exposaient. Ce trafiquant-là avait assez de ressources, et de relations pour se payer un avocat mais tous n’avaient pas cette chance, même si en l’occurrence l’avocat, aussi bon soit-il, semblait avoir d’autres préoccupations. Ce dernier songea tout de même à essayer d’avancer dans l’études du dossier, et ainsi de faire patienter Carron une ou deux heures dans l’espoir de lui faire comprendre qu’on ne le convoquait pas impunément comme il venait de le faire. Mais la perspective de cette entrevue suffit à couper à Alexandre toute envie de travailler et, pensif, il s’enfonça dans son confortable siège en cuir. « Dans les plus brefs délais » lui avait-on dit... Il réfléchit quelques instants puis soudain, un mince sourire étira ses lèvres. Sans plus attendre, il se leva, s’enveloppa dans un long manteau pour parer au froid lancinant de ce mois de mars, et sortit de son bureau. Là, il avisa sa secrétaire.
« Dites-moi, mademoiselle, vous n’avez pas faim par hasard ? demanda-t-il avec ce sourire charmeur le servait si bien.
- Euh...si, répondit la jeune femme en levant un sourcil perplexe.
- Parfait. Laissez tomber tout ça, je vous invite à déjeuner. »
La demoiselle hésita un instant, puis estimant qu’un véritable déjeuner ne se refusait pas, d’autant que Maître Reigner n’avait pas l’air de vouloir lui laisser le choix, elle le remercia de son invitation et le suivit.
Dans les plus brefs délais... et puis quoi encore ?

Ils s’installèrent dans un restaurant voisin (dont le propriétaire devait à Alexandre de n’avoir eu qu’à payer une amende presque ridicule au regard du trafic auquel il se livrait pour continuer à servir) pour un peu moins de deux heures. La jeune secrétaire, qui avait été embauchée quelques semaines plus tôt, ne se laissa pas impressionner par la présence (peu oppressante ceci dit) de son patron, et profita même de la conversation pour glisser quelques revendications, comme celle de n’avoir plus à traiter avec cette espèce de mégère qui officiait chez monsieur le secrétaire d’Etat Carron, sans vouloir manquer de respect à votre beau-père, Maître, bien entendu. Celui-ci eut alors un grand éclat de rire, tout en se félicitant de l’avoir embauchée, même s’il ne pouvait hélas lui promettre que la mégère les laisserait en paix un jour. Elle soupira, mais avoua qu’elle s’en doutait, et annonça qu’elle se contenterait d’une augmentation si les appels devaient se faire plus fréquent, ce qu’ils ne souhaitaient pas ni l’un ni l’autre. Finalement, ce fut elle qui coupa court à la conversation, arguant que l’après-midi était arrivé, et qu’elle avait mille choses à faire. Alexandre la laissa partir, et nota en l’observant s’éloigner qu’elle ressemblait un peu à Julie, en blonde et en moins fasciste - ou du moins, il l’espérait car les sermons de sa soeur sur son évident manque d’enthousiasme quant la présence des Allemands en France lui suffisaient amplement. Il se crispa légèrement en réglant l’addition, le souvenir de sa soeur lui rappelant brusquement qu’il n’avait toujours pas de nouvelles de Philippe. Presque quatre mois s’étaient écoulés depuis de coup de filet auquel Louise avait échappé de peu, et son frère n’avait toujours pas réapparu. Même Julie s’inquiétait, d’autant que la petite enquête qu’elle avait essayé de mener depuis son poste à la Milice (en râlant, évidemment, parce qu’elle prenait d’énormes risques, mais avec une énergie digne du lien qui unissait la fratrie Reigner) n’avait rien donné. Plus le temps passait, moins l’espoir de voir Philippe réapparaître semblait permis et cette pensée, conjuguée à celle de l’entrevue qui l’attendait acheva de faire perdre son sourire à Alexandre, dès l’instant où il quitta le restaurant.

Il eut beau prendre son temps, il finit par arriver. La még...secrétaire n’était pas à son poste, mais il se garda bien de l’attendre et alla directement frapper à la porte du bureau, qu’il ouvrit sans attendre de réponse. Au fond de la pièce, se trouvait Carron, installé dans son fauteuil. Un autre homme était assis face à lui. Il se retourna, permettant ainsi à Alexandre de reconnaître Léon Claussat, le beau-père de son vieil ami Edouard. Surpris, il les dévisagea un instant.
« Excusez-moi, je ne pensais pas interrompre votre... hum, petite réunion, lança-t-il en voyant Claussat rassembler quelques papiers. Je vais vous laisser terminer, et...
- Restez, Reigner ! Nous vous attendions, l’interrompit Carron. »
Étrangement, l’idée d’être attendu par les deux hommes en même temps ne rassura pas Alexandre sur la suite. Il fronça les sourcils, perplexe.
« Vous m’attendiez... tous les deux ? Je suis touché. »
Ils levèrent les yeux au ciel dans un ensemble parfait et presque inquiétant, tirant un rictus indéfinissable à l’avocat. Avec ce qu’il savait de Claussat, l’association qu’il avait sous les yeux ne lui disait absolument rien qui vaille. Il jeta presque un regard de regret à l’extérieur lorsqu’on lui demanda de fermer la porte, avant de faire quelques pas dans le bureau pour se laisser tomber sur le seul siège de libre.
« Qu’est-ce que je peux faire pour vous, messieurs ? demanda-t-il, l’air bien plus détendu qu’il ne l’était réellement. »
Il y eut un court silence, dont les deux beaux-pères profitèrent pour se jeter un regard entendu tandis qu’Alexandre les observait en essayant de deviner ce qui pouvait motiver une telle réunion. S’il avait d’abord espéré - assez naïvement, certes - que Carron avait des nouvelles de sa famille à lui donner, la présence de son nouvel acolyte excluait absolument tout ce qui touchait à Isis, Octave et Louise. Et il eut beau mettre à profit ce blanc dans la conversation pour faire preuve d’une grande créativité, aucune des solutions qui lui traversèrent l’esprit ne lui sembla envisageable. Et pour cause. Quoi qu’il pût imaginer, il ne pouvait pas ne serait-ce que soupçonner la vérité.
« Nous avons besoin de vous, et de vos talents, pour mener une petite enquête, répondit enfin Claussat (qui, soit dit en passant, savait de quoi il parlait puisqu’il lui devait de n’avoir pas été éclaboussé par l’affaire Barbier en trente-cinq).
- Vous me flattez mais je suis avocat, pas inspecteur, rétorqua aussitôt Alexandre. Et les avocats ne mènent pas d’enquête, mais je suppose que vous le saviez. »
Il ajouta un sourire insolent. Les deux hommes arborèrent face à lui exactement le même air à la fois sévère et perplexe, devant lequel il ne put s’empêcher de plaisanter :
« Vous faites un charmant couple vous savez ? Improbable, mais charmant.
- Vous ne devriez pas faire le malin, Reigner, l’avertit Carron, vous pourriez vite ravaler vos provocations.
- C’est vous qui avez besoin d’un avocat un peu malin, pas l’inverse. Et vue d’ici, votre affaire ne sent pas bon, ce qui veut dire que vous avez besoin de quelqu’un de bon, et donc que vous ne trouverez pas meilleur que moi. Ça me donne le droit de plaisanter, je crois. »

À dire vrai, Alexandre n’était pas aussi à l’aise qu’il voulait bien le montrer, ce qui avait pour effet de le faire redoubler d’insolence, et aurait préféré en venir immédiatement au fait. Mais ceci, il ne l’aurait avoué pour rien au monde, aussi afficha-t-il un sourire cavalier. Son beau-père allait répliquer mais Claussat l’interrompit avec un geste qui signifiait quelque chose comme « laisse tomber, l’ami, il ne sait pas ce qui l’attend. » Du moins, c’est comme ça que l’interpréta Alexandre.
« Il y a un traitre au gouvernement, reprit le père de la femme que Cabanel n’aurait jamais dû épouser (son ami, à l’époque, le lui avait pourtant bien dit), certainement en contact avec de Gaulle. Nous surveillons donc tous nos collaborateurs ayant été en Angleterre depuis 1940.
- C’est un bon début, lança l’avocat qui commençait à se demander dans quoi est-ce qu’on allait l’impliquer.
- Fermez-la.
- Venez-en au fait alors, je n’ai pas toute la journée.
- Il y a longtemps que vous n’avez pas de nouvelles de mon gendre, n’est-ce pas ? »
Alexandre resta un instant silencieux. Il scruta les traits des deux hommes en y cherchant un sens à cette dernière phrase. Mais non contents de ne lui donner aucune indication, le regard inquisiteur de Claussat et l’expression mauvaise de Carron lui firent encore plus redouter la suite.
« C’est exact, répondit-il prudemment.
- Mais vous savez qu’il a été nommé ambassadeur à Londres après Riom ?
- J’en avais vaguement entendu parler.
- Vous qui êtes si malin, vous devez pouvoir comprendre ce qu’on attend de vous, maintenant. »

Il y eut un nouveau silence. Alexandre fixa Claussat, puis Carron, avant de revenir au premier. Non, il ne comprenait pas. Parce que s’ils voulaient bien dire ce qu’il avait cru comprendre, il ne pouvait s’agir que d’une plaisanterie - or ils avaient l’air parfaitement sérieux.
« Honnêtement ? Je vous ai connu plus clair.
- Ce que monsieur Claussat essaye de vous faire comprendre, c’est que nous avons besoin que vous repreniez contact avec Edouard Cabanel, pour essayer de savoir s’il ne profite pas de sa place auprès de l’ambassadeur de Vichy à Paris pour transmettre des informations à Londres, répondit Carron le plus calmement du monde. Est-ce que c’est assez clair pour vous ? »
C’était bien ce qu’Alexandre avait compris. Il avait bien face à lui son beau-père et celui de son plus vieil ami, qui lui demandaient le plus sérieusement du monde de renouer avec ce dernier, perdu de vue depuis des mois, et de l’espionner pour leur compte.
La surprise passée, il n’y tint plus et explosa de rire, sous le regard à la fois blasé et furieux (drôle de mélange) de ses deux interlocuteurs.
« Je peux savoir ce qui vous fait rire ? lança Carron.
- Vous n’êtes pas sérieux ?
- Qu’est-ce qui vous fait croire ça ? »
L’avocat cessa de rire, autant à cause du sourire de mauvais augure qui étira les lèvres de Claussat que parce qu’il fallait bien qu’il puisse s’expliquer.
« Vous savez que je connais Edouard depuis le lycée...
- Et que vous étiez les meilleurs amis du monde, oui, nous savons ça. Ce qui fait de vous la personne la mieux placée pour cette petite enquête.
Alexandre enveloppa son interlocuteur d’un regard profondément méprisant.
« Monsieur Claussat, puisque vous savez tout, rassurez-moi : vous ne pensez pas vraiment que je vais accepter de reprendre contact avec lui, juste pour le trahir si je venais à apprendre qu’il est en contact avec de Gaulle ? Surtout que, vous m’excuserez, mais il faudrait vraiment être stupide pour faire de la résistance en ayant un beau-père comme vous. »

Un nouveau court silence s’installa. Claussat et Carron échangèrent un second regard entendu, ce qui ne sembla franchement pas de bon augure à l’avocat. Finalement, c’est son propre beau-père qui se leva, en faisant mine de réfléchir.
« Nous vous laissons juge de la stupidité ou non de Cabanel mais pour le reste, nous sommes tous les deux certains que vous allez accepter, oui.
- Vous pouvez toujours courir, Carron, c'est hors de question, cracha Alexandre, outré, tout en se levant et en se dirigeant vers la porte. Cette conversation n’avait que trop duré.
- Dites-moi, il y a longtemps que votre frère n’a pas donné signe de vie, je crois. Quatre mois si je compte bien. »
L’avocat se figea brusquement et sa main se crispa sur la poignée.
« Vous aimeriez avoir de ses nouvelles, je suppose. »
Il se retourna, soudain bien plus furieux qu’insolent.
« Vous n’avez rien sur Philippe, personne ne sait où il est passé !
- Au contraire, nous savons très bien ce qui lui est arrivé, répondit calmement Carron avec un sourire presque vicieux. Nous savons qu’il a été chanceux : c’est la police et non la Gestapo qui l’a arrêté et il n’a pas trop brusquement été interrogé. Il a été enfermé mais monsieur Claussat et moi-même avons veillé à ce qu’il ne soit pas déporté avec les autres détenus politiques. Nous savons aussi que vous étiez parfaitement au courant de ses activités, ce qui n’est pas trop dérangeant dans votre cas mais risquerait de mettre votre soeur dans une situation délicate, surtout si ses supérieurs venaient à savoir qu’elle a usé de son statut pour essayer de prendre de ses nouvelles. Vous voyez... nous sommes bien plus au courant que vous. »
Alexandre dut faire un effort particulièrement violent pour ne pas s’emporter immédiatement, et effacer de leur visage cet air goguenard.
« En résumé, reprit Claussat, votre frère est un terroriste, que vous-mêmes et votre soeur avez couvert, et votre femme n’était pas étrangère à ses activités. Votre entourage est sacrément compromis, Reigner...
- Et il est évident que nous ne garderons pas tout ça pour nous si vous ne faites pas un effort en retour. »

Alexandre, pâle comme un linge, resta un moment étourdi. Ses mains se crispèrent violemment, dont l’une autour de la poignée de la porte qu’il n’avait toujours pas lâchée.
« Vous êtes... commença-t-il, la voix vibrante de colère. Mais il ne trouva pas les mots, et Carron en profita pour enfoncer le clou.
- Je vous avais bien dit que vous finiriez par ravaler vos petites plaisanteries. Est-ce que vous comprenez, maintenant, pourquoi vous allez accepter de vous occuper du cas de Cabanel. Est-ce que c’est assez clair cette fois ? »
L’avocat sentit la tête lui tourner, mais avec un effort, il se redressa et darda sur son beau-père un regard plus noir que jamais. Un silence lourd s’installa, alors qu’il prenait la mesure du chantage auquel on voulait le soumettre. Edouard ou sa famille. Avait-il seulement le choix ?
« Je crois que j’ai compris, inutile d’insister, cracha-t-il avec difficulté.
- Vous êtes un brave garçon, Reigner, lança alors Claussat en se levant à son tour. »
Il passa auprès de lui et posa brusquement la main sur son épaule.
« Evidemment, si vous essayez de prévenir Cabanel, je le saurais. À partir d’aujourd’hui j’aurais toujours un oeil sur vous, et à la moindre bêtise, c’est toute votre jolie petite famille qui saute, souvenez-vous en. »
Alexandre, raide au possible, détourna le regard. Il en prit ni la peine de répondre, ni celle de tourner la tête lorsque la porte se referma sur Claussat. Face à lui, son beau-père n’avait pas quitté son sourire mauvais. Il saisit une enveloppe sur son bureau et contourna le meuble massif pour se planter face à son gendre, qui n’avait pas bougé d’un pouce, et baissa à peine les yeux sur le pli que Carron lui mit de force dans la main.
« Si vous voulez revoir votre femme et vos enfants un jour, je vous conseille de vous tenir à carreau Reigner. Il le jaugea un instant. J’ai une petite mission supplémentaire pour vous. »
L’avocat sembla enfin sortir de sa torpeur. Il leva brusquement la tête, sourcils froncés.
« Qu’est-ce vous voulez ? demanda-t-il sèchement.
- Je n’ai pas totalement confiance en Léon Claussat. Je sais qu’il mène un certain nombre de petites intrigues ici et à Vichy... Essayez de vous tenir informé.
- Vous vous foutez de moi ?
- Non, vous le savez très bien, répondit le secrétaire d’Etat, tirant un rictus cynique à son gendre. Maintenant vous pouvez sortir. »

Alexandr ne se fit pas prier et tout en serrant convulsivement l’enveloppe qu’il n’avait toujours pas regardée, il quitta le bureau de son beau-père en prenant soin de claquer la porte derrière lui, et gagna rapidement l’extérieur. Il fit quelques pas avant de s’arrêter, appuyé contre un mur, et tenta d’encaisser le coup, en vain. Le passé l’avait largement prouvé, il n’était pas un homme de grands principes, mais malgré les nombreux mois passés depuis sa dernière entrevue avec Edouard, il ne pouvait avaler sans difficulté l’idée de ce qu’il allait devoir faire. Il ferma un instant les yeux, avant de les baisser enfin sur le papier que Carron lui avait remis. L’enveloppe avait sans doute été envoyée dans un autre paquet, car elle ne portait nulle trace de timbre. En revanche, elle était bien remplie et au dos, en lieu et place du destinataire, une main enfantine avait tracé ces quelques mots : « Pour Papa, à Paris. »
Alexandre dut lutter contre le noeud qui menaçait de se former dans sa gorge. Il repartit précipitamment en essayant de se convaincre que la situation n’était pas si catastrophique qu’elle en avait l’air. Après tout, Edouard n’avait peut-être rien à voir avec Londres.

Il parvint difficilement à se composer une expression neutre avant de rentrer dans son propre bureau. Sa secrétaire était à son poste. Il la considéra un instant sans réellement la voir.
« Je peux faire quelque chose pour vous, patron ? lança-t-elle, le tirant de ses sombres réflexions.
- Oui... J’ai besoin que vous envoyiez un message. Elle hocha la tête et prit de quoi noter, tandis qu’il se passait une main nerveuse sur le visage.
- J’écoute, insista-t-elle devant son silence. »
L’avocat dévisagea un instant la jeune femme. Il pouvait encore reculer.
« Laissez tomber.
- ... D’accord.
- Enfin, non, prenez ça : Caribou toujours ouvert. Stop. RDV demain soir. Stop. 20h. Stop. Trop longtemps. Stop. Signé...
- Maître Reigner, compléta la jeune femme, s’attirant un rictus pensif de la part de son patron.
- Non : signé Marc-Antoine. Stop.
- Marc-Antoine ? »
Alexandre ne répondit pas, mais elle comprit à son oeillade qu’il valait mieux ne pas insister.
« Où est-ce que je l’envoie ?
- J’en sais rien, répondit-il plus sèchement qu’il ne l’aurait voulu. Adressez-le à Edouard Cabanel, débrouillez-vous pour l’adresse. »
Elle se contenta de lever les yeux au ciel tandis qu’il rentrait dans son propre bureau. Là, il se laissa tomber dans son fauteuil, et se prit la tête dans les mains un moment. Puis enfin, il ouvrit l’enveloppe et en sortit la longue lettre que lui avaient écrit Isis et Octave. La première depuis presque deux mois.
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